Pas d'Europe budgétaire fédérale, mais la BCE omnipotente et son solo idiot du NAIRU

"L'Europe à coeur", Sculpture Ludmila Tcherina, PE Strasbourg

La politique monétariste de la BCE provient d'un malentendu d'un économiste libéral Franco Modigliani, Prix Nobel d'économie en 1985. Ce malentendu, le NAIRU, le taux de chômage n'accélérant pas l’inflation (Non-Accelerating Inflation Rate of Unemployment) est une estimation pour un pays et à un instant donné du taux de chômage minimum qui puisse s'accompagner d'une inflation stable. Modigliani se faisait l'écho du dogme du "chômage naturel" de Milton Friedmann.

Les politiques monétaires systématiquement anti-inflationistes des grandes banques centrales européennes et de la BCE depuis 1999 et l'introduction de l'Euro ont été dénoncées par Franco Modigliani lui-même, inspirateur du Nairu: "Le chômage est principalement le résultat de politiques macroéconomiques erronées inspirées par une crainte obsessionnelle de l’inflation et une attitude considérant le chômage comme quantité négligeable." Il n'est plus difficile aujourd'hui de connaître les vrais chiffres du chômage.

Joseph Stiglitz, dans son livre "Quand le capitalisme perd la tête", dans lequel il passe en revue les échecs et les réussites de l'administration Clinton, à laquelle il a participé, affirme le caractère dépassé de l'utilisation du NAIRU comme "référence idéale conduisant à un optimum de la situation économique". Selon lui, il est clair que cet indice n'est plus pertinent pour déterminer le lien entre chômage et inflation, et que la foi en ce lien a pour effet d'empêcher les gouvernements de mettre en œuvre des politiques orientées vers l'emploi. En effet, la Banque Centrale d'un pays est indépendante du Gouvernement. Une de ses principales missions - comme c'est le cas pour la Réserve Fédérale des États-Unis (Fed') ou la BCE - est de veiller à la stabilité des prix, si bien que toute politique budgétaire expansionniste mise en œuvre par le Gouvernement sera contrée par une politique monétaire restrictive de la Banque Centrale en augmentant les taux d'intérêt et donc le coût de l'emprunt.

Les dispositions sur la BCE dans la Constitution européenne renforcent l'orientation actuelle de la politique monétaire et s’opposent aux mesures qui pourraient la mettre en cause alors qu'elles entraînent la croissance plus faible et le chômage plus fort de ce côté de l’Atlantique par rapport aux USA. Rien ne doit venir gêner la mission principale de la BCE c’est-à-dire la défense d’un euro "fort" pour le marché financier (sous couvert de lutte contre l’inflation). Le Pacte de stabilité (Articles III-184-1 et 184-2) fait pression contre les dépenses publiques, les déficits budgétaires et les emprunts publics. Il empêche le soutien de la dépense publique par la création monétaire. Cette politique joue contre l’emploi et la croissance réelle en favorisant la domination des marchés financiers et les rendements financiers élevés pour les capitaux.

a) la Constitution européenne verrouille le statut et la fonction de la BCE: une série d’articles sacralisent la BCE telle que l’a conçue le traité de Maastricht. Ils verrouillent et aggravent ses orientations actuelles. Ce sont les Articles I-34, III-185 et suivants, les articles concernant les différentes politiques de l’Union européenne, et les Protocoles annexés.
- La BCE est indépendante du débat démocratique, des citoyens et des forces sociales, politiques nationales et européennes (Article III-188) mais elle est très sensible aux exigences des marchés financiers.
-La BCE a un objectif primordial, la stabilité des prix (Article III-185-1) sans mission pour l’emploi, la formation, la recherche, la croissance et cet objectif déclaré devient celui de l’Union elle-même (protocole sur les statuts de la BCE).
- La BCE pilote le Système européen de banques centrales (SEBC). Celui-ci intègre sans les faire disparaître les banques centrales nationales. Il monopolise le pouvoir d’orientation sur le crédit des banques en Europe (Article III-185-2).
- La BCE doit être consultée (ou elle peut se saisir elle même) sur toute décision qui pourrait mettre en cause sa mission primordiale (Articles III-185-4 et III-190) y compris les politiques sociales, salariales, d’emploi etc...
- La révision des statuts de la BCE n’est possible que sur proposition de la Commission européenne ou de la BCE elle-même et après sa consultation (Articles III-187-3 et III-187-4).

b) négation par la Constitution européenne des politiques budgétaires: pour éviter des mesures budgétaires nationales laxistes nuisibles aux autres Etats membres, le Traité sur la Constitution Européenne préconise une coordination des politiques au sein des GOPE qui ne sont que des recommandations émises et non contraignantes (Grandes Orientations de Politique Economiques). Une procédure d'encadrement des déficits publics est complétée par les mesures du Pacte de Stabilité (1999, suite au Traité de Maastricht de 1992) et vise plutôt l'équilibre financier que le contrôle de l'évolution de l'endettement public. C'est une vision minimaliste de l'intervention budgétaire limitée au mécanisme des stabilisateurs automatiques dont l'efficacité est réduite par la diminution de l'Etat préconisée dans le TCE sans pour autant conduire la gestion de l'Union Economique et Monétaire vers un fédéralisme souhaitable. Le TCE recommande de soutenir par une politique de la demande des actions structurelles favorables à l'offre, mais les Etats membres sont dénués de moyens efficaces pour le réaliser.

Dans l'Union Monétaire Européenne les Etats Membres de l'Euro-Groupe ont abandonné le contrôle de leur monnaie, le pouvoir de fixer le taux d'intérêt et le taux de change relativement à leur situation économique. Les chocs conjoncturels ne peuvent donc être contrés qu'avec les outils budgétaires au niveau national ou en coordination au niveau européen pour éviter que des mesures nationales ne se nuisent mutuellement. De plus il est impératif de respecter les 4 critères de Maastricht pour garantir l'objectif de la stabilité des prix. La Constitution reste parfaitement fidèle au Traité de Maastricht dans la Partie III, Chapitre 2, section 1 consacrée aux principes de coordination des actions économiques dans le cadre des GOPE (Grandes Orientations des Politiques Economiques) et des modalités de contrôle des déficits excessifs. Il est pratiquement impossible d'amender cette partie de la Constitution européenne même dans une procédure de révision simplifiée.

Le Conseil des Ministres est habilité à adresser une recommandation à un Etat membres dont la politique budgétaire risque de mettre en péril l'objectif de la stabilité des prix de la BCE au mépris de la situation économique et de l'emploi qui n'en sont que subordonnées. L'Irlande avait même été sommée en 2001 de procéder à un freinage budgétaire alors que l'excédent budgétaire était de 4,7% et les dettes publiques étaient faibles; l'Irlande pouvait, selon le Conseil, induire une tendance inflationniste nuisible à l'Union européenne.

Il est curieux que la BCE s'autorise de déroger au critère de Maastricht des 3% d'inflation sans autoriser aux Etats membres des dérogations aux niveaux des 3 autres critères. Face à ces 4,7% d'excédent budgétaire irlandais ayant dû être impérativement freinés… il existe le "taux idéal" d'inflation européenne qui est plutôt proche des 2% (recommandés par la BCE en 2004) que des 3% comme ordonnés par les critères de Maastricht. Les contraintes budgétaires sont d'autant plus contraignantes que le taux d'inflation idéal devant assurer la stabilité des prix est dangereusement bas. Un taux de 2% implique de danser sur le fil du rasoir, soit sur une moyenne de 1%, ce qui signifie que certains Etats membres sont en situation de quasi déflation qui est bien plus dangereuse que l'inflation, et donc pour l'activité économique et pour l'emploi. Dans la pratique, la BCE a du mal à faire respecter ce taux de 2% malgré le chômage massif proche du taux de chômage idéal, comme le définit le NAIRU.

L'obligation d'éviter les déficits publics excessifs (de l'année en cours) est destinée à éviter l'augmentation de la dette publique (dettes cumulées des années précédentes). Dans l'esprit de la Constitution cette obligation est destinée à obtenir des finances publiques saines (selon les critères), d'où l'obligation pour les Etats membres d'obtenir à moyen terme un excédent budgétaire. Cette conception méprise le "seuil de viabilité" des économies nationales contemporaines. Or la disparition à long terme de la dette publique a l'inconvénient de mettre en cause le bon fonctionnement des marchés financiers assuré par la liquidité des titres publics et donc de réduire les moyens de politique monétaire et d'endettement de l'Etat pour des mesures de programme ou de relance économique. La Constitution interdit la dette aux finances de l'Union européenne (Article I-53-2), ce qui n'existe pas dans la Constitution américaine. A cause de la Constitution européenne il n'existera jamais une politique budgétaire européenne et pas de fédéralisme budgétaire européen.

La Constitution donne un pouvoir nouveau au Conseil des Ministres par rapport au Traité de Maastricht. C'est lui seul qui décide s'il existe un déficit excessif. Il n'a plus besoin de consulter les recommandations de la Commission. Il n'existe pas de justification économique de la valeur de 3% du PIB pour le déficit public et de 60% du PIB pour la dette publique. Ces valeurs sont constitutionnalisées et pérennisées au mépris des situations économiques particulières des Etats membres et de leur différence structurelle, au mépris de leurs histoire et spécificité économiques. Les sanctions sous forme d'amende contre les Etats membres contrevenant aux critères ne peuvent pas s'appliquer, même s'ils font sur une période (un peu plus longue que prévue) les efforts pour assainir leurs finances publiques (Grèce, Portugal, Allemagne, France). La Constitution qui a pourtant conservé in extenso la procédure des sanctions s'interdit tout amendement sans révision constitutionnelle qui, elle, doit se faire à l'Unanimité.

Au fait, c'est qoui le déficit public? Pour la Constitution le déficit public n'est que le besoin de financement net des administrations publiques. Un déficit ne sera donc jamais, comme dans d'autres économies nationales, un déficit corrigé des fluctuations cycliques par rapport à un indicateur courant ou excluant les investissements publics. Sont donc à jamais exclues par la Constitution des mesures de relance keynésiennes. En plus simple, le déficit public est formé par le financement des administrations, donc il faut moins d'administrations, moins de dépenses sociales, moins de dettes, pas de dépenses pour la recherche, le développement, la relance, l'emploi mais des finances publiques "saines", saines selon les critères de Maastricht. A l'heure où la seule survie de l'Europe face à la mondialisation est l'avance technologique et la formation publique de très haut niveau, c'est très grave!! Nos "Conventionnels", les Rédacteurs de la Constitution n'ont pas voté pour l'avenir, mais pour le maintien de leurs avoirs immobiliers qui ne seront pas grignotés par l'inflation, une distribution de salaire supérieure aux travailleurs, une création d'emplois et des investissements lourds pour le long terme. C'est une Constitution de vieillards boursicoteurs qui ne veulent voir rogner leurs dividendes immédiats du capital. Parce qu'en Europe aussi, le "capital patient", celui des investissements productifs pour le long terme et générateur d'un enrichissement collectif, disparait au profit d'un rating trimestriel d'un capital qui doit offrir à très court terme un retour sur investissement aux détenteurs de parts; la shareholder value des entreprises doit augmenter très vite et cracher du cash tout de suite pour les actionnaires; les salariés n'étant que des accessoires nuisibles à la réalisation de cet enrichissement privé et un handicap nuisant gravement à la réalisation de l'équilibre budgétaire de l'Etat. Ploums. L'entreprise ne sera plus jamais "citoyenne". La Constitution européenne est libérale, c'est une Constitution de classe, d'une seule classe et tant pis si de pauvres lecteurs attribuent mes propos à l'extrême gauche. Blair, Schröder, Marie Ségolène Royal sont des centristes libéraux, à leur gauche existe une place énorme. Ne pas vouloir voir qu'elle existe est une façon de gagner du temps pour favoriser, au compte de sa propre classe, le transfert de richesses, de pouvoirs et de savoirs. C'est faire de la politique.

c) les deux caractéristiques léthales du Pacte de Stabilité et de Croissance: L'économiste Charles Wyplosz pense qu'il faut s'attaquer à la logique du Pacte de Stabilité et de Croissance. "Suite aux exemples réussis existants d'organismes nationaux, tels que des instituts indépendants, qui mènent la surveillance des politiques budgétaires et économiques nationales et font connaître publiquement leur avis sur la mise en oeuvre de celles-ci, les Etats membres pourraient étudier comment ce type d'institutions pourraient s'intégrer dans leur cadre institutionnel national". ("Le Pacte de Stabilité atteint ses limites", Revue d'économie financière, n° 71, août 2003). La proposition de Wyplosz s'inspire des comités de politique monétaire existant auprès des banques centrales. M. Wyplosz propose de mettre en place, dans chaque Etat membre de la zone euro, un "comité de politique budgétaire", chargé de fixer, chaque année, un plafond de déficit public ne devant pas être dépassé. Ce plafond serait déterminé, notamment, en fonction de règles définies au niveau communautaire. Le législateur garderait en revanche sa latitude actuelle pour déterminer les autres paramètres budgétaires.

Extrait du Financial Times, 31 January 2005: "Charles Wyplosz, a professor of economics at the Graduate Institute of International Studies in Geneva, argues that, although the existing Stability and Growth Pact was "so rigid that it could not work", the flexibility proposed by German Chancellor Gerhard Schröder is "excessive". Schröder's proposal that the budget deficit limit of 3% be lifted when governments do good things or face difficult economic conditions is too "vague" for the economist, who says that this effectively means the decision will be left to political appreciation of the Council of Ministers.
Such a scenario would be a "recipe for disaster", both failing to enforce fiscal discipline and deepening the growing rift between small and large countries. His solution is for countries to set their own commitments in terms of medium-term targets for public debt and then have them validated by the parliaments of each member state and negotiated with the others.
For Wyplosz, the only valid definition of fiscal sustainability is that the public debt - as a share of gross domestic product - does not grow without limits. Two of the pact's "lethal characteristics" were its focus on annual budget deficits and its way of dispossessing national governments and parliaments from their sovereign right to set fiscal policy. The revised stability pact should concern itself only with stabilising debts, ideally bringing them down to more comfortable levels than at present.
"

d) Partie III de la Constitution, pas de politiques budgétaires actives: il n’est un secret pour quiconque que le "NON" de gauche exprime le rejet de principes proclamés par la Partie III du projet de Constitution européenne portant sur l’affirmation de l’orientation libérale et sur le dogme de la libre concurrence. La Partie III du projet de Constitution soumis à référendum devait faire avaliser par les peuples consultés des principes qui seraient définitivement constitutionnalisés avec possibilité de n'être cassés qu’avec l'unanimité des 24 Etats membres, autant dire jamais.

Les électeurs n'ont pas cru, en exprimant le NON, que la sauvegarde de la compétitivité européenne doive uniquement provenir de la promotion "d'une main-d’oeuvre qualifiée et susceptible de s’adapter ainsi que des marchés du travail aptes à réagir rapidement à l’évolution de l’économie" (Article III-203), de "l'économie de marché ouverte où la concurrence est libre" (Article III-178), donc d'un dysfonctionnement du travailleur dans ses ambitions et dans sa formation. A la différence de la Charte des droits fondamentaux des Partie I & II qui proclame des droits sans sanction et tourne le dos à l’objectif d’harmonisation par le haut, la Partie III fixe un cadre étriqué qui constitue l'obstacle à la mise en oeuvre d’une politique de progrès social s’attaquant aux racines du mal dans tout pays membre de l’Union qui en manifesterait des velléités. Selon la Constitution, le mal du chômage provient du travailleur, s'il ne s'adapte pas au marché.

La Constitution européenne reprend les dispositions du Traité de Maastricht (1992) et affiche la défiance de l'Union face aux politiques budgétaires actives de stimulation et de relance de l'économie et de l'emploi. Le Pacte de Stabilité (et de croissance; 1999) affirme sans fondements scientifiques les préférences pour l'automaticité des stabilisateurs budgétaires. L'Article III-178 stipule que les Etats membres de l'Union européenne doivent conduire les politiques "dans le respect du principe d'une économie de marché ouverte où la concurrence est libre, favorisant une allocation efficace des ressources". Le terme "efficace" relève de la doctrine ou de présupposés idéologiques, cette forme d'économie devrait parvenir de manière naturelle à l'équilibre économique stable assurant un taux naturel de sous-emploi qui est l'expression d'une situation dans laquelle les anticipations sur les prix des biens et des services sont réalisés (NAIRU).

La Commission émet de très sérieuse réticences quant à "l'activisme budgétaire contra-cyclique" des Etats membres". Ceci ne pourrait être vrai que si le "taux naturel de sous-emploi" était stable et si les comptages statistiques étaient incontestatbles. Par exemple le gouvernement Clinton avait obtenu un taux de chômage de 4% avec les tensions inflationnistes, alors que le taux idéal devait être de 6%. Le gouvernement Chirac chante pour chaques fêtes de fin d'année un chiffre du chômage ayant diminué. Ce gouvernement ment, tout comme le précédent gouvernement socialiste de Jospin qui avait subitement changé les modes de calcul. Il est de nos jours plus facile d'obtenir des chiffres proches de la réalité sur le site www.actuchomage.org ou sur l'Observatoire des Inégalités. La différence entre les chiffres annoncés et les chiffres réels souligne le niveau de transparence et la qualité de la démocratie que nous avons atteint.

La confiance aveugle réitéré dans tout le texte de la Constitution européenne dans "l'efficacité", dans "l'affectation efficace des ressources" dans "une économie concurrentielle de marché qui tend au plein-emploi" et qui devrait mener à un optimum, relève de la scansion religieuse et n'est en tous cas que fondée sur un modèle économique élémentaire dans lequel la concurrence est pure et parfaite. Il n'existe que des concurrences imparfaites qui ne permettent que des affections déséquilibrées des ressources, Stiglitz, Prix Nobel d'économie, conseiller de la Fed' (Federal Reserve américaine, Banque Centrale US) et du FMI (Fond Monétaire International), l'a suffisamment prouvé. Il reste donc un champ d'application énorme ouvert aux politiques budgétaires. C'est une chance a côté de laquelle la Constitution décide de faire passer les peuples des Etats membres... au nom de la stabilité des prix. Un redressement économique dépend de la combinaison de mesures budgétaires et monétaires anti-cycliques et elle est toute indiquée selon les économistes dans la situation européenne de conjoncture basse durable.

e) Le Pacte de Stabilité et d'incroissance comme Ultima ratio regum, l'ultime argument des rois: les rois sont le Conseil des ministres européen forcément conservateur, les Commissions européennes forcément conservatrices, le Parlement européen forcément conservateur. Quand on ne veut pas gagner à la loyale, en offrant la meilleure politique économique, on change les règles du jeu à l'avantage de celui qui en tire le plus grand profit, les conservateurs élus par la classe aisée ou qui croit encore l'être. Une politique budgétaire discrétionnaire est donc interdite par la Constitution. La politique budgétaire en reste réduite à ne réagir qu'aux variations conjoncturelles en exploitant les outils offerts par la structure institutionnelle. Dans un ralentissement conjoncturel, les allocations chômage augmentent quand les recettes fiscales diminuent automatiquement, ce qui freine la baisse de l'activité et évite d'amplifier la détérioration de la situation de l'emploi. Le chômage induit par la baisse conjoncturelle n'est pas éliminé. Le Pacte de Stabilité abandonne les mesures budgétaires et monétaires discrétionnaires et ne repose que sur la mise en œuvre de stabilisateurs automatiques autour d'une limitation du déficit public et "d'une position d'équilibre". Ceci décrit l'unique dispositif contracyclique. Les stabilisateurs automatiques ne peuvent être efficaces que si l'Etat, doté de moyens, est habilité à réguler l'économie de marché. La Constitution réduit l'Etat à ses fonctions régaliennes de réaliser "un espace de liberté, de sécurité et de justice". Son intervention économique n'est que tolérée pour réaliser "un marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée". (Article I-3-2)

Les moyens dont dispose l'Etat sont éliminés par la baisse considérable de l'impôt sur les bénéfices des sociétés (bien inférieur à celui des USA) et par la baisse de l'impôt sur les revenus dans une proportion bien moindre, ce qui correspond à un transfert de richesses organisé par l'Etat au profit des investisseurs et peut-être de l'offre, si la même part devait être réinvestie dans l'économie de production et non dans la spéculation des marchés financiers ou dans la délocalisation à l'étranger des investissements productifs. Ces baisses d'impôt sont réalisées pour satisfaire à la concurrence fiscale intra-communautaire avec la croyance en une harmonisation automatique. Selon l'Article III-171 de la Constitution, l'unanimité du Conseil des ministres est nécessaire pour statuer sur les questions d'harmonisation fiscale. Vous vous souvenez de la demande française de la baisse de la TVA pour le secteur de la sandwicherie et le secteur hôtelier qui est rejetée par Bruxelles. Avec la nouvelle arrivée de la Roumanie et de la Bulgarie comme Etats membres de l'Union des 27, la concurrence ne peut être que faussée entre des partenaires économiques à forces et gravitations totalement opposées. La création de l'Union européenne se fait de plus en plus sur un élargissement incontrôlé, et politiquement incontrôlable.

L'efficacité des stabilisateurs automatiques est aussi réduite par la volonté de réduire le système public de protection des chômeurs et de les rendre responsables de leur situation de leur mise à l'écart de l'emploi. L'équilibre des finances publiques, objectif premier du Pacte de Stabilité, est financée en partie par les chômeurs. Le rôle "éducatif" ou coercitif de l'Etat est de stimuler la recherche de l'emploi et de promouvoir la main d'œuvre "susceptible de s'adapter". Les pays scandinaves et la Hollande ont pourtant réussi à concilier dans les années 90 le redressement de leur économie et le maintien de la protection sociale élevée.

La souveraineté nationale des Etats membres ayant disparu en matière monétaire et budgétaire, les dernières mesures budgétaires structurelles n'ayant toujours pas fait leur preuve depuis 1999 sur le niveau de chômage européen qui tend même à augmenter et à atteindre la barre (officielle) des 10%, il ne reste que le travail et le domaine social comme valeur d'ajustement qui devient la dernière marge de manoeuvre. Les Etats membres se découvrent une nouvelle croyance: la réduction de la protection des salariés, le réaménagement à la baisse du droit social, la mie en cause des acquis sociaux, l'austérité salariale, la dérégularisation des contrats de travail et l'allègement des conditions de licenciement. Les Etats membres s'imaginent améliorer l'emploi et stimuler la croissance. Le chômage massif européen augmente, les salaires diminuent, le transfert de richesses des salariés au profit des investisseurs et des spéculateurs sont organisés par le Pacte de Stabilité et d'indigence, et sont constitutionnalisés ad vitam eternam par la Constitution.

L'Europe connaissant une conjoncture basse durable est dépendante de la demande et de la conjoncture extérieures à ses frontières pour réaliser ses excédents budgétaires ou simplement son équilibre. Elle ne met pas, dans sa situation d'éternel malingre, l'emploi en avant comme le font les USA. Elle a scellé dans son Pacte de Stabilité et dans sa Constitution une conception économique libérale qui est loin d'être partagée par les économistes et dont l'efficacité n'est pas vérifiée. Un amendement de tous les articles promouvant cette conception libérale est quasi impossible et nécessitera, à l'Unanimité, une révision du Pacte et de la Constitution. Qu'à cela ne tienne, l'Europe s'élargit et va encore jouer sur une décennie avec l'illusion du marché concurrentiel libre et non faussé jusqu'à l'adhésion de la Turquie et de l'Ukraine. La réalité de l'élargissement du marché trop commun de l'Europe constitue la fuite en avant des "conventionnels", Rédacteurs des Traités et de la Constitution européenne. Seule un catastrophe économique rendra cet aréopage de tartufes, communautaires et unionistes, raisonnables et audacieux au niveau macro-économique pour le bien des peuples européens.
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