Directive Service Bolkenstein 2 - Lustrations libérales du Janus européen Parlement Conseil
Par Thomas, le Cimbre le 27. mai 2007, - Catégorie : Constitution, Europe solidaire - Lien permanent
La plus grande mise sous tutelle commerciale de tous les temps des peuples européens est entrain de prendre Force de Loi avec la version régionale de l'AGCS, celle de sa tête-de-pont Bruxelles Strasbourg.
Il s'agit de la Directive Service de décembre 2006 et de sa révision extension engagée le 8 mai 2006.
La Directive Service, Bolkenstein n°2, a été adoptée en décembre 2006 par un vote catastrophique du Parlement européen de Strasbourg qui se distingue d'habitude par ses "votes surprises".
L'adoption de la Directive Service est une violation du droit communautaire et du traité fondateur instituant la Communauté européenne . Cette violation a été, comme à l'accoutumée, voulue par la droite chrétienne-démocrate, les sociaux démocrates dans leur écrasante majorité et les libéraux.
Je vous entretiens régulièrement sur mon site du darwinisme libéral de l'évolution européenne inspirée par son maitre contemporain von Hayek, ses amis de la Société du Mont Pèlerin, par Robert Schumann et Jean Monnet et par Milton Friedmann et ses Chicagos boys résidant à Bruxelles. Bien sûr vous ne savez toujours pas si mes propos sont ceux d'un polichinelle du clavier, d'un gauchiste ou d'un crétin, d'un intervenaute blogosphorant gestionnaire de son petit neuro-district à lui, le "Rénovez Maintenant 67, journal d'un Cimbre". Une chose est sûr il faudra que vous lustriez les aspérités les plus déplaisantes de votre égoconscience pour rejeter en bloc ce libelle.
Vous voudriez peut-être savoir si la Directive Services est effectivement un resucé de la proposition Bolkenstein et vous voudriez comprendre le mode de fonctionnement centrifuge des appareils de décision communautaire de l'Europe de Strasbourg et de Bruxelles? Je vous propose un historique de la Directive Service, qui elle même n'est qu'une déclinaison de l'AGCS pour la Région Europe, garante de son principe de subsidiarité face à l'OMC... L'Europe se doit de se faire croire, en légiférant par Directives, qu'elle est garante de la liberté de ses peuples à disposer d'eux-mêmes.
Pour parvenir à la lustration libérale de la version définitive de la Directive Service adoptée en décembre 2006, pour les intimes Bolkenstein n°2, le Conseil des Ministres des 25 avait restreint l’exclusion des services sociaux du champ d’application de la directive conformément à l'étalon à suivre, celui de l'AGCS. Cette exclusion avait été proposée en première lecture en février 2006 par le Parlement Européen de Strasbourg.
Le Conseil des Ministres avait introduit des formules ambigües sur les services publics et sur la protection des consommateurs que l'on peut résumer dans les deux principe suivants: "liberté de prestation de service" et "liberté de circulation des travailleurs". En soi ces formules ne sont pas ambigües, elles le sont dans leur champ d'interprétation, d'application et d'évaluation.
Cette reformulation (libérale) n'a pas moins de portée qu'une remodelisation constituante de la communauté Européenne, et permet de faire passer en dosettes ce que le §3 du TCE, du Traité Constitutionnel Européen, voulait faire passer en force. Mais bientôt, avec le nouveau Chef Président de la France, il n'y aura même plus besoin d'organiser des contournements de la procédure parlementaire européenne ou française, il suffira d'un spoonshake entre Angela Merkel et notre Chef Président.
Les formules ambigües constituent une très grave violation de l'esprit communautaire: alors que le droit du travail n’est pas une compétence de l’Union européenne, le Conseil des Ministres européens des 25 a subordonné le respect du droit du travail au niveau national au respect du droit communautaire. Ce qui est une manière de modifier le Traité européen instaurant la Communauté européenne sans le dire et de limiter l’exclusion du droit du travail du champ d’application de la Directive. Au Pays de Galles, les anglais me parlaient de Strasbourg et de son "Palace of Burocracy". Je vais finir par dire la même chose qu'eux, même si je les avais continuellement tancés en leur reprochant de ne faire que de "traire l'Europe au lieu d'accomplir leur devoir de solidarité".
Le Conseil des Ministres des 25 avait également modifié le texte initial de février 2006 du Parlement européen en indiquant que le respect des droits fondamentaux (droit du travail) est subordonné au respect du droit communautaire et que ces droits doivent être conciliés avec les quatre libertés fondamentales constitutives du Traité de Rome: la liberté d’établissement et de circulation des personnes, des biens, des capitaux et des services. Cette nouvelle interprétation normative du Conseil des Ministres des 25 constitue une violation des droits fondamentaux inscrits dans les constitutions et législations nationales.
Pour l’application de la Directive Services, le Conseil des Ministres des 25 gouvernements a consenti, sans disposer de la légitimation à le faire, à un abandon de souveraineté en confiant à la Commission européenne un droit de regard sur les législations nationales du travail et sur les pouvoirs locaux. Ceci doit surement être une extension descendante du principe de subsidiarité. Ne rions pas, il s’agit simplement d’un abus de pouvoir de l’exécutif européen, et d'une violation du principe de subsidiarité dont l'objectif idéal serait de protéger les peuples européens.
La question du droit de travail applicable dans le cas du détachement temporaire d’un prestataire de services et du personnel employé avait été clarifiée, mais le Conseil des Ministres des 25 n’a pas affirmé la "primauté du droit du pays d’accueil pour le détachement permanent" laissant ainsi libre cours à la jurisprudence de la Cour de Justice qui privilégie le droit du pays d’origine. Les procès actuels entre la Lituanie et la Suède (Laval Viking Vaxholm) nous apportent la réelle face des manquements de cette Directive Service et nous souligne la judiciarisation des rapports entre employeurs et employés. La judiciarisation de ces questions du droit du travail introduit dans les rapports entre employeurs et employés une autre échelle du temps, un énorme ralentissement, et un aspect semi-virtuel. Ce qui ne peut plus être régulé par des rapports syndicaux et des confrontations négociales et de lutte, forcément très réactives et branchées sur l'immédiat et le réel, est laissé à la justice qui se nourrit de jurisprudence et du long terme pour agir, car une décision de justice ne doit pas être prise dans l'urgence pour ne pas servir les intérêts particuliers mais l'intérêt général. Dans cette grande phase de procédure juridique ou judiciaire, le monde du travail répond, lui, à des impératifs économiques, à l'urgence des marchés, lui-même de plus en plus soumis aux impératifs financiers et non à des impératifs industriels et managériaux de stake-holders.
Revenons aux pratiques de l'Exécutif européen et du Parlement Européen qui ne sont que le Janus, la tête à deux faces d'un même corps. Seul un critère de temporalité différencie ces deux face accolées. La face exécutive est plus pressée que la seconde, la face de la lecture parlementaire des textes, plus pressée à introduire à tous les étages, non pas la liberté des peuples européens à disposer d'eux-mêmes, mais à les soumettre à la liberté des marchés. Suma, Sumarum, Roma, Romarum.
Pour parvenir à la Directive Service adoptée en décembre 2006, le Parlement européen avait été saisi de la nouvelle mouture du texte proposée par le Conseil des Ministres des 25 et avait dû se prononcer. En Commission parlementaire du Marché Intérieur, 43 amendements furent déposés. Pour l’essentiel, ils tendaient à rétablir le texte tel que le Parlement l’avait adopté en février 2006, mais également à supprimer les incertitudes créées par la Commission européenne suite aux "Communications interprétatives" qu’elle avait présentées en vue de limiter la portée des modifications apportées par le Parlement européen.
Les 43 amendements au texte du Conseil des Ministres ont été examinés en Commission parlementaire du Marché Intérieur le 9 octobre 2006. Les représentants du Conseil des Ministres et de la Commission européenne ont exprimé une opposition brutale à ces amendements.
"Vous pouvez toujours amender ce texte, nous n’en tiendrons pas compte", c’est ainsi que Francis Wurtz (eurodéputé communiste strasbourgeois depuis 25 ans, seul eurodéputé qui n'a jamais manqué aucune session du Parlement européen), le président du groupe parlementaire GUE/NGL, a dénoncé en la résumant la position des représentants du pouvoir exécutif européen. Le nouveau Chef Président de la France est entrain d'ériger en mode de vie cette pratique parlementaire dénégationniste de la volonté des euro-peuples représentés dans l'ambiance feutrée du Parlement européen de Strasbourg. Les peuples européens et le Parlement européen ont ceci d'agréable que les politiciens et les exécutifs gouvernementaux peuvent les contourner dans cette ambiance élégante du soft putsch permanent. Le TCE est rejeté, il devient un mini-Traité angelo-sarkozyien, Bolkenstein est rejeté, il devient Directive Service, les services sociaux et de santé sont exclus de la Directive Service, ils y sont réintroduits le 8 mai 2007. Tout ceci dans cette raison d'Etat de servir les marchés, la seule politique européenne, celle pratiquée par l'abandon. La politique est la science du transferts des richesses, des pouvoirs et des savoirs vers une classe.
On se trouvait dès lors devant la perspective d’une situation nouvelle prévue par les procédures existantes (article 251 du Traité instituant la Communauté européenne). On allait devoir passer à une phase intitulée procédure de conciliation. En effet, si le Parlement européen, lors de la deuxième lecture, refuse d’accepter tel quel le texte du Conseil des Ministres, le Conseil des Ministres peut adopter les amendements du Parlement ou les refuser. S’il les refuse, un comité de conciliation est convoqué en vue de rechercher un texte commun. Si au terme de six semaines, aucun texte commun n’est dégagé, la proposition de Directive est abandonnée. En annonçant d’emblée, le 9 octobre, son opposition à chacun des 43 amendements, le Conseil des Ministres des 25 indiquait clairement qu’on se dirigeait vers la procédure de conciliation.
La commission parlementaire s’est réunie le 23 octobre 2006. Il n’y a pas eu de majorité pour défendre le recours à la procédure de conciliation. Une majorité s’est nettement dégagée pour adopter le document du Conseil des Ministres tel quel: 26 voix pour, 4 contre et 6 abstentions. Les parlementaires se sont inclinés devant la volonté des gouvernements nationaux et de leurs boys du Conseil des Ministres des 25.
C’est donc le texte du Conseil des ministres qui a été adopté par le vote de l’ensemble du Parlement à l'issue du débat en séance plénière, à Strasbourg. La Directive Service libéralisant les services au sein de l’UE a été adoptée. La droite chrétienne-démocrate, les sociaux démocrates dans leur écrasante majorité et les libéraux veulent la libéralisation du plus grand nombre de services, veulent revoir à la baisse le droit du travail et veulent conférer des pouvoirs accrus à la très ordolibérale Commission européenne afin qu’elle puisse empêcher tout changement issu des élections des eurodéputés ou issu des NON français et hollandais des Référendums du TCE. Je crois en la force des marchés s'ils sont au service d'une République.